L'inversion est un des gestes premiers de l'art et de la production de sens, un processus élémentaire et fondamental de la pensée.

Dans l'histoire des arts, elle fut source de nouveauté, de renversement des valeurs et de modernité : le tableau renversé de Kandinsky “invente” l’abstraction, l’urinoir de Duchamps déséquilibre la critique et fonde un espace d'humour entre celui qui regarde et celui qui fait.

Au yoga, dans le corps, par delà l'aspect performatif qui peut stimuler audace et courage, pratiquer les inversions c'est jouer avec la gravité. Renouer avec l'enfance : son ardeur face à toute expérience, son plaisir de la question infinie, sa joie de chaque progrès. 

C'est puissamment libérateur de ce qui bride la confiance. 

C'est accepter le risque du déséquilibre, pour entrer dans une maitrise corporelle où le mental n'est pas limitant mais attentif et soutenant. 

Selon la tradition yogique, la pratique des inversions est source de longévité : l'écoulement de l'amrita bindu, nectar d'immortalité vers le sommet de la tête, évite sa stagnation dans l'estomac et sa destruction par Agni, le feu digestif  : le pratiquant se sent alors comme allégé et rafraîchi, ses processus mentaux sont stimulés, et il retrouve une énergie propre à la jeunesse.

Et puis, la pratique des inversions modifie notre rapport à l'espace - enracinement,  équilibre. On y tend vers des directions aériennes. Chacun peut pratiquer à son niveau. Intensément et avec légèreté.